Le Lycée Jeunes Filles à Port-au-Prince déborde de monde. Autrefois un lieu d’apprentissage, il abrite désormais plus de 5 000 personnes contraintes de quitter leur domicile en raison de la violence des gangs qui ravage le pays depuis plusieurs années. 

Les anciennes salles de classe et les couloirs servent maintenant d’espaces de vie, chacun étant occupé par des familles et des personnes portant en elles des récits de perte et de souffrance. Parmi elles, Nadine et Claude, dont les chemins se sont croisés sur ce site de déplacement. 

Entourée de ses quelques affaires personnelles dans son petit espace, Nadine s’adapte à sa nouvelle vie dans cette ancienne école. Photo : OIM/Antoine Lemonnier

Nadine est assise dans son coin, entourée de ses affaires soigneusement empilées : des couvertures, des contenants et quelques précieux souvenirs de sa vie passée. Malgré tout, cet espace exigu lui offre une petite mesure de stabilité dans un monde d’incertitude. 

Claude et sa famille partagent un petit coin d’une salle de classe transformée en logement. L’intimité reste un défi, les couvertures faisant office de murs. Photo : OIM/Antoine Lemonnier

Pendant ce temps, Claude veille sur sa famille avec un regard protecteur. Sa femme et son enfant sont assis à ses côtés, leurs expressions mêlant épuisement et espoir. Il reste vigilant, pleinement conscient de leur vulnérabilité dans cet espace surpeuplé. Pour Claude, dans un environnement où la stabilité est durement acquise, « chaque jour est un combat pour préserver notre dignité et assurer la sécurité de ma famille. » 

Aujourd’hui, cependant, une lueur de soulagement apparaît. L’OIM a prévu une clinique mobile sur le site pour offrir un soutien médical tant attendu. Pour de nombreux résidents comme Nadine et Claude, l’accès aux soins de santé est rare, souvent inexistant depuis leur déplacement. L’arrivée des équipes mobiles de cette clinique représente une bouée de sauvetage, une opportunité de répondre aux besoins de santé négligés depuis trop longtemps. 

Organiser les soins malgré les défis 

Déployer les équipes pour une clinique mobile de l’OIM est une entreprise complexe. Cela nécessite de surmonter des défis logistiques et sécuritaires, transporter du matériel, des fournitures et une équipe de professionnels de santé à travers des terrains parfois difficiles et disputés par des gangs. C’est là qu’Edwisson, le président du comité de gestion du site, joue un rôle crucial. 

Edwisson est bien connu au Lycée Jeunes Filles. Avec une connaissance approfondie du site et de ses résidents, il comprend leurs luttes, leurs récits et leurs besoins. Son rôle est inestimable : il fait le lien entre l’équipe de l’OIM et la communauté, orientant le personnel médical vers les personnes les plus nécessiteuses. 

Edwisson, président du comité qui gère le site au quotidien, aide à coordonner l’aide fournie par l’OIM et ses partenaires. Photo : OIM/Antoine Lemonnier

En parcourant le site aux côtés de l’équipe de l’OIM, Edwisson indique les résidents particulièrement vulnérables, comme Nadine, qui se sent faible et fatiguée depuis des semaines. Il s’arrête devant l’abri de Claude, échangeant quelques mots avec lui et prenant note de ses préoccupations pour la santé de sa famille. Lorsque la clinique est pleinement opérationnelle, Edwisson s’est assuré que personne ne soit laissé pour compte, que chaque personne ayant besoin de soins soit prise en compte. 

Au Lycée Jeunes Filles, hommes et femmes font la queue pour recevoir des kits d’hygiène et une assistance médicale de base fournie par l’OIM. Photo : OIM/Antoine Lemonnier

Sensibilisation et éducation à la santé 

En attendant leur tour, Nadine et Claude reçoivent bien plus que des soins de santé de base : ils reçoivent également des informations essentielles. Pendant l’attente, le personnel médical mène des séances de sensibilisation sur des problématiques sanitaires fréquentes dans les contextes de déplacement. Des sujets comme l’hypertension, le VIH et même la prévention des AVC sont abordés, avec des conseils pratiques pour gérer sa santé dans des conditions de vie précaires. 

Nadine écoute avec attention un médecin de l’OIM expliquer l’importance de reconnaître rapidement les symptômes d’un AVC, une compétence qui peut sauver des vies dans ces circonstances. Claude absorbe chaque mot, conscient que ces informations pourraient faire une différence vitale pour sa famille. Ces séances, bien que brèves, sont impactantes, offrant aux résidents des outils pour se protéger et protéger leurs proches dans un environnement où les risques sanitaires sont amplifiés. 

Lorsque vient le tour de Nadine, elle s’approche de la station médicale et s’assoit face à un médecin qui l’écoute avec patience et empathie tandis qu’elle décrit ses symptômes. L’examen est basique mais essentiel, se concentrant sur les préoccupations de santé immédiates et offrant des solutions lorsque cela est possible. 

Les membres du personnel de l’OIM fournissent un soutien médical essentiel, garantissant que les résidents aient accès aux traitements et consultations nécessaires. Photo : OIM/Antoine Lemonnier

Cependant, tous les besoins de santé ne peuvent être traités immédiatement lors de la clinique mobile. Pour les cas nécessitant des soins spécialisés ou avancés — infections graves, maladies chroniques ou grossesses à risque — l’équipe de l’OIM oriente les patients vers des hôpitaux publics, où les services sont gratuits, ou des établissements privés dont les coûts sont couverts par l’OIM afin de garantir que personne ne reste sans les soins nécessaires. Ce réseau de soutien prolonge l’impact de la clinique, veillant à ce que les problèmes de santé critiques soient pris en charge au-delà de la consultation initiale. 

 

Bien plus qu’une aide temporaire 

L’équipe de l’OIM ne s’arrête pas là. Dans les jours et les semaines qui suivent, elle assure un suivi auprès de Nadine, Claude et d’autres visiteurs ou patients des cliniques mobiles. Pour certains, ce suivi implique des appels téléphoniques afin de s’assurer que les traitements prescrits sont efficaces. Pour d’autres, notamment ceux dont les conditions évoluent, l’équipe peut revisiter le site pour offrir des soins supplémentaires ou faciliter de nouvelles références vers des hôpitaux spécialisés. Cet engagement dans le suivi souligne la volonté de l’OIM d’aller au-delà d’une aide temporaire — c’est une promesse d’accompagner les personnes déplacées face aux tragédies qu’elles traversent. 

Le travail vital de l’OIM pour fournir une assistance médicale aux populations déplacées, ainsi que d’autres formes de soutien, est rendu possible grâce à l’appui indéfectible des donateurs. Ce soutien garantit que l’OIM puisse rester sur le terrain, répondre aux besoins urgents et s’adapter aux nouveaux défis qui surgissent. Les contributions des donateurs forment le socle de ces efforts vitaux, transformant la compassion en aide concrète pour ceux qui vivent dans les conditions les plus difficiles. 

Les noms ont été changés. Toutes les personnes figurant sur les photos ont été informées de leur usage et ont donné leur consentement. 

Cette histoire a été rédigée par Antoine Lemonnier, chargé de la communication pour l’OIM en Haïti.